Qui mieux qu’un personnage de roman pour faire vivre de nouvelles expériences aux internautes ? Au cours de vos différentes lectures, il vous est sûrement arrivé de tourner frénétiquement les pages pour connaître l’issue. Ce niveau d’attention est propre au roman. Avant d’entamer les premières pages, le lecteur passe un pacte tacite avec l’auteur : céder à l’illusion de la fiction et la tenir pour réalité. Est-ce ce « réalisme psychologique » qui permet au lecteur de s’abandonner à l’histoire ? Pas seulement, comme l’indique Milan Kundera, dans l’Art du Roman, nous n’avons pas besoin d’imaginer Don Quichotte comme un être vivant. Atteindre ce niveau d’engagement est le rêve de tout professionnel du marketing et de la communication. Arrêtez de vous battre contre des moulins à vent et prenez le temps de lire ces quelques lignes…
Dans The Attention Economy, plusieurs sortes d’attention sont théorisées : aversive qui indique un danger, attractive qui laisse entrevoir un gain, patente qui déclenche un effort et, enfin, latente qui se place en arrière-plan d’une tâche principale. Pour créer de l’engagement suffirait-il de recourir à ces quatre formes d’attention ?
A trop vouloir chercher l’attention, à capter du « temps de cerveau disponible » en faisant appel à différents mécanismes cognitifs, les marques n’oublieraient-elles pas l’essentiel ? L’attention n’est rien sans engagement.
Comment concilier alors le pouvoir d’attraction des personnages de roman avec les mécaniques d’attention du marketing et de la communication ? Quelques pistes à travers des exemples de la littérature classique.
Faust, le pacte de l’attention aversive
Dans l’œuvre de Goethe, Heinrich Faust est un alchimiste brillant, mais qui, au crépuscule de sa vie, ne croit plus en sa quête du savoir universel. Enclin au désespoir, il conclut un pacte avec le diable.
Dans ce pacte, le diable propose à Faust de découvrir les plaisirs de la vie. Tout au long de sa seconde existence, Faust restera conscient d’avoir une épée de Damoclès au-dessus de sa tête. Sa dépendance au diable sera alors totale.
Votre objectif n’est pas de faire un pacte avec les internautes pour les rendre dépendants. Il s’agit de mieux mettre en lumière ce qu’ils peuvent gagner en lisant vos contenus sur votre page Facebook ou en découvrant votre nouvelle vidéo sur YouTube.
Valmont, la tentation de l’attention attractive
Le Vicomte de Valmont est un personnage central des Liaisons Dangereuses de Choderlos de Laclos. On peut le considérer comme l’archétype du dandy qui a élevé la séduction au rang d’art. Narcissique et cynique, il n’en est pas moins un véritable stratège qui mettra tout en œuvre pour séduire la jeune Cécile de Volanges. Mais dans ce jeu d’attraction et de manipulation des sentiments, la Marquise de Merteuil, à la fois rivale et amante, se montrera encore plus douée.
Suivre Valmont dans les conquêtes qui vont le mener à sa propre perte, nous montre que la frontière entre séduit et séducteur est très mince. Il est simple de passer de l’un à l’autre. Mettre au point des contenus attractifs peut facilement capter l’attention des internautes. Néanmoins, attention aux illusions. Une multitude de likes ne se traduit pas nécessairement par un engagement sur le long terme. Ne vous laissez pas berner par le pouvoir de séduction des internautes, ne finissez pas comme Valmont.
Martin Eden, l’effort de l’attention patente
L’histoire de Martin Eden est fortement inspirée de celle de son auteur, Jack London. C’est le roman d’apprentissage par excellence. Martin Eden est un jeune marin d’Oakland, démuni et vivant dans l’ignorance et la violence. Après avoir pris la défense d’Arthur Morse dans une rixe, il se lie d’amitié avec lui et sa famille. Il rencontre alors sa sœur Ruth, dont il tombe amoureux. Pour ne pas contraster avec ce nouveau milieu bourgeois qui est le sien, il s’efforce de se construire une culture encyclopédique. Il délaisse alors le travail manuel pour l’écriture.
L’apprentissage est un formidable moteur d’attention qui peut engager les internautes sur le long terme. Il est donc souvent pertinent de placer dans ses contenus de marque, aussi bien BtoC que BtoB, des éléments de savoir capables de nourrir les internautes les plus curieux. En négligeant cet aspect, vous pourriez passer à côté d’ambassadeurs de marque de premier choix.
Joseph Valet, le jeu de l’attention latente
Dans Le Jeu des perles de verre, Herman Hesse relate le parcours, intellectuel et spirituel, de Joseph Valet en Castalie.
Parmi les nombreux enseignements de cette œuvre, une semble essentielle pour capter les internautes : veiller à la cohérence des messages malgré leur diversité. La maîtrise de ce jeu, jamais totalement décrit dans l’œuvre par son auteur, dépend de la faculté du joueur à « ouvrir sans cesse ses fenêtres sur toutes les autres disciplines. » Pour capter les internautes, vous pouvez jouer sur leur attention latente. S’ils sont réceptifs à un contenu particulier, ils seront plus à même de comprendre l’identité de votre marque, dans son intégralité. Etes-vous prêt à faire de votre stratégie de marque un équivalent du Jeu des perles de verre ?
Que ce soit à travers l’attention aversive, attractive, patente ou latente, capter les internautes n’est que le premier chapitre du roman de l’engagement. Pour arriver jusque-là, n’oubliez pas que c’est grâce aux personnages qu’on se souvient d’une histoire. A vous de trouver le meilleur personnage !